Le 24 mars 2023, le Département d’État américain a rendu public le résumé de « La Stratégie des États-Unis pour la prévention des conflits et la promotion de la stabilité Plan stratégique décennal pour Haïti ». Le document a été rédigé par le « Bureau of conflict and stabilisation operation ».

Washington, https://www.lemiroirinfo.ca, Dimanche 26 Mars 2023

Selon la définition du Département D’État, « Le Bureau des opérations de conflit et de stabilisation (CSO) est chargé de diriger la formulation et la mise en œuvre des stratégies, politiques et programmes américains de prévention et de stabilisation des conflits. Il assure le secrétariat du groupe de travail multi-agences du gouvernement américain sur la prévention des atrocités et est le principal responsable de la mise en œuvre de la stratégie américaine de prévention des conflits et de promotion de la stabilité. À la fin de 2021, le CSO a créé l’unité de soutien aux négociations pour aider les diplomates américains et d’autres responsables à résoudre certains des différends les plus épineux et les plus insolubles. Les efforts des OSC pour réduire la fragilité, renforcer les institutions démocratiques et accroître la cohésion sociale avec et au sein des pays partenaires prioritaires font directement avancer les objectifs de la politique étrangère des États-Unis. »

La divulgation de ce document intervient après l’échec du président américain Joe Biden auprès du premier ministre canadien Justin Trudeau. Le Canada a refusé de prendre la tête d’une force internationale armée en Haïti. Les USA vont chercher à stabiliser la situation. Haïti devra apprendre à vivre avec ses problèmes. Nous publions ci-après la nouvelle philosophie américaine pour Haïti. Les États-Unis sont résolus à aider Haïti à devenir un pays plus sûr, plus stable et démocratique, reflétant ainsi les profonds liens entre les populations de nos pays. Haïti se trouve à un moment critique sans équivalent dans son histoire : en juillet 2021, le président Jovenel Moïse a été assassiné. Depuis début septembre 2022, la détérioration spectaculaire de la sécurité paralyse le pays. Des gangs criminels, soutenus pour beaucoup d’entre eux par

des acteurs politiques ou économiques corrompus, ont pris le contrôle d’infrastructures stratégiques vitales, dont le Port International de Port-au-Prince et le principal terminal pétrolier du pays (Varreux) pendant deux mois. Le blocus du terminal pétrolier a mené à une quasi-paralysie de services essentiels tels que la distribution d’eau et l’assainissement, la collecte des déchets, l’approvisionnement en électricité et les centres de santé.

Cette situation critique est en outre aggravée par la vulnérabilité extrême d’Haïti aux chocs environnementaux. Les efforts de la communauté internationale en matière de diplomatie et d’assistance ont obtenu des résultats mitigés et leur impact a suscité une grande attention ainsi que des débats. Les violences sexistes et les profondes inégalités entre les sexes risquent de compromettre la stabilité en Haïti, et les femmes et les filles pâtissent de façon disproportionnée des changements climatiques, de la violence, de l’absence d’État de droit et de l’insécurité alimentaire dans le pays.

En avril 2022, le président Biden a annoncé que le gouvernement des États-Unis ferait d’Haïti un pays prioritaire pour la mise en œuvre la Stratégie des États-Unis pour la prévention des conflits et la promotion de la stabilité. Ce choix d’Haïti se fonde sur son importance stratégique et sa proximité avec les États-Unis et la nécessité d’adopter une approche à long terme plus concertée pour remédier aux facteurs d’instabilité dans le pays. La situation en matière de sécurité en Haïti continue de se détériorer considérablement, ce qui ne fait que souligner à quel point il est urgent d’adopter une approche à long terme qui renforce et intègre la mobilisation des États-Unis en matière de diplomatie et de développement et dans le secteur de la sécurité en Haïti. Le présent plan définit un cadre et une approche échelonnée pour les efforts des États-Unis, qui pourront être adaptés à plus ou moins grande échelle et échelonnés en fonction de l’évolution des perspectives politiques et de sécurité du pays.

Ce plan a été mis au point dans le cadre d’un processus réunissant différents organes publics et mené par l’ambassade. Il est le fruit de consultations auprès de plus de 230 personnes représentant l’État et la société civile d’Haïti, des organisations multilatérales et bilatérales, le secteur privé, les milieux universitaires, la diaspora haïtienne et des experts et praticiens, ainsi que de délibérations de plus vaste portée en matière de politiques entre les organes publics des États-Unis sur l’élaboration en Haïti d’une approche stratégique à long terme des activités à mener dans ce pays dans le cadre du Global Fragility Act (loi GFA, sur la fragilité dans le monde). Ce groupe de travail poursuivra ses activités en assurant la coordination de la mise en œuvre. Ce plan appuie et orientera toutes les stratégies des États-Unis en matière de diplomatie et d’aide étrangère en Haïti, y compris la  Stratégie de pays intégrée du Département d’État des États-Unis et le  Cadre stratégique USAID/Haïti  pour 2020-2024.

Le plan vise à orienter l’action des États-Unis et à l’aligner progressivement sur un objectif à long terme: que les citoyens et les autorités d’Haïti fassent progresser une vision commune et un environnement propice à la stabilité à long terme. Cet objectif prévoit que les institutions d’État soient davantage capables et réactives aux besoins élémentaires des Haïtiens et qu’en même temps, les Haïtiens fassent davantage confiance aux institutions publiques de façon à participer aux processus civiques et politiques dans le pays.

Dans le cadre de ce plan, les États-Unis mobiliseront au fil du temps leurs efforts diplomatiques et l’assistance autour de deux objectifs généraux:

  • Objectif 1: Faire progresser une gouvernance réceptive et responsable et la sécurité.
  • Objectif 2: Favoriser la mobilisation et la prospérité de la population.

Le plan prévoit une approche par phase, axée en priorité sur les efforts à déployer dans un premier temps dans les secteurs de la sécurité et de la justice compte tenu du contexte actuel en Haïti. Pendant cette première phase, les efforts des États-Unis consisteront à associer et à tirer parti des partenaires de la société civile haïtienne et de la police nationale d’Haïti pour orienter et mettre en œuvre des programmes visant à renforcer la sécurité des citoyens et l’État de droit, tout en assurant la protection et la promotion des droits de la personne et du principe de responsabilité. Les premiers efforts seront axés sur des quartiers clés connaissant un taux de criminalité et de violence élevé et des centres économiques et de transport vitaux.

Une fois la priorité accordée aux besoins en matière de sécurité et de justice lors de la phase I, la phase II commencera à remédier aux causes profondes de l’instabilité, en s’appuyant sur la réforme du secteur de la justice tout en favorisant la participation citoyenne et les perspectives économiques. La phase III contribuera à renforcer les systèmes dont les Haïtiens ont la maîtrise de façon à avoir un impact durable et à obtenir des changements institutionnels fondamentaux. Cette approche par phase permettra aux États-Unis de s’adapter à l’évolution de la situation sur le terrain, y compris en tirant parti d’éventuelles nouvelles possibilités.

Le plan accorde une grande importance aux partenariats avec les dirigeants et les acteurs haïtiens. Pour garantir une meilleure viabilité et un plus grand impact, les États-Unis favoriseront la direction et la maîtrise locales de tous les efforts prévus dans le plan. Conscients de la difficulté de se concerter avec le gouvernement dans le contexte de la crise actuelle, les États-Unis chercheront et associeront à leurs efforts des dirigeants favorables aux réformes aux niveaux à la fois national et local. Le présent plan présente une approche axée sur des partenariats locaux pour faire appel à des représentants d’un ensemble aussi vaste que possible de parties prenantes, qui garantisse que les Haïtiens sont artisans de la définition et de la mise en œuvre de la trajectoire leur pays en matière de développement. Il comprend également un plan de communication stratégique pour veiller à ce que les efforts financés par les États-Unis soient amplifiés efficacement dans l’ensemble du pays.

Ce plan reconnaît que malgré les meilleures intentions et les ressources considérables investies à ce jour, les efforts internationaux menés entre autres par les États-Unis en matière de diplomatie et d’assistance n’ont pas toujours atteint leurs objectifs ou permis d’obtenir des résultats inclusifs et équitables. Conformément aux objectifs de la Stratégie, les États-Unis sont résolus à promouvoir des approches novatrices et fondées sur des données probantes. Le plan incorporera les enseignements tirés de décennies d’intervention menées en Haïti et ailleurs, à savoir que l’obtention de résultats durables passe par une collaboration à l’échelle de toute l’administration, une approche systémique plus globale visant à remédier aux facteurs d’instabilité d’Haïti et un horizon en termes de planification qui dépasse les cycles de financement habituels. Outre sa collaboration avec des acteurs du gouvernement haïtien là où cela est possible, les États-Unis renforceront leurs relations avec la société civile haïtienne, y compris les groupes religieux et les ONG, ainsi que d’autres donateurs internationaux, les organisations de la diaspora haïtienne et les organismes multilatéraux pour faire progresser la réalisation de ce plan.

Plus précisément, les États-Unis sont résolus à promouvoir les domaines suivants d’innovation dans le cadre de ce plan :

  • Suivre une approche ciblée, par phase: Adopter une vue globale à long terme de la situation, qui tire parti de la volonté politique et des possibilités de partenariat.
  • Mettre l’accent sur les progrès plutôt que sur les programmes: Privilégier une attitude tournée vers l’avenir plutôt que réactive, qui a pour priorité d’obtenir des résultats durables dans des domaines prioritaires.
  • Rechercher l’innovation tout en reproduisant à plus grande échelle les succès obtenus: Identifier des initiatives novatrices, fondées sur des données probantes et ayant fait leurs preuves, qui puissent être menées à plus grande échelle.
  • Favoriser un degré accru de coordination interne au sein des autorités des États-Unis: Veiller à ce que les activités menées dans les différents départements et agences des États-Unis correspondent à une stratégie commune et soient optimisées en conséquence.
  • Accorder la priorité aux solutions menées à l’échelle locale: Le plan fait en sorte que tous les éléments de la stratégie s’appuient sur les partenariats et une coordination à l’échelle locale, assurant une meilleure viabilité et une plus grande efficacité des efforts des États-Unis.
  • Favoriser la coordination internationale intentionnelle: Le plan énonce une stratégie de coordination internationale visant à promouvoir l’alignement des donateurs, à éviter les activités qui se répètent et à maximiser l’impact obtenu.

Le plan reconnaît explicitement et cherche à contrer les nombreux risques inhérents à l’approche qui, s’ils ne sont pas atténués, pourraient nuire à la réalisation des objectifs. Cela comprend notamment la situation d’ensemble, sur le plan politique et en matière de sécurité, en Haïti. Les efforts des États-Unis sont conçus pour pouvoir s’adapter à l’évolution de la situation sur le terrain. Là où il existe des possibilités d’avoir un plus grand impact, les États-Unis intensifieront leur appui et réduiront les programmes, y mettront fin ou changeront d’approche là où les efforts se seront avérés moins fructueux. Des activités rigoureuses de suivi, d’évaluation et d’apprentissage seront essentielles au succès de ce plan. Nous veillerons à tirer les enseignements des efforts précédemment menés en Haïti et en tiendrons compte lors de la mise au point des programmes et des politiques, à la fois au stade de leur conception et par une adaptation en temps réel.

Source: lenouvelliste