Le café est l’un des produits agricoles haïtiens, destinés à l’exportation, tout comme la mangue francisque. Ces produits permettent au pays de rentrer des devises et maintenir du même coup, sa balance commerciale à un certain niveau. Pourtant, Dondon, commune du département du Nord, réputée zone de production caféière par excellence, a subi de plein fouet les impacts de la pandémie de Covid-19, qui n’a pas épargné Haïti.

Dondon, https://www.lemiroirinfo.ca, 27 Décembre 2020

En plus des problèmes récurrents, tels que les maladies ( rouille et scolyte), la sécheresse, le déboisement à outrance, qui affectent depuis toujours le développement de cette filière, l’épidémie du nouveau Coronavirus a, en quelque sorte, enfoncé le clou dans la plaie.

Pour Luctoine Bien-Aimé, 69 ans, qui pratique cette culture depuis sa tendre enfance, la Covid-19 a eu des conséquences néfastes sur les moyens de subsistance des agriculteurs. « À Dondon, ce sont les coopératives caféières qui nous permettent d’écouler nos produits ». « Cela se passe ainsi depuis jadis» explique le cultivateur. « Deux fois par an, nous approvisionnons en café l’une des trois coopératives caféières de la place qui sont chargées de les exporter à l’étrangers.

Une fois l’expédition est effectuée nous avons reçu de la coopérative une première rente sur la vente. La deuxième partie, nous est parvenue 6 mois plus tard, le plus souvent au mois de juillet de chaque année », raconte ce père de famille de 8 enfants, dont sa femme vit avec un handicap moteur depuis tantôt 19 ans. Luctoine Bien-Aimé déplore qu’à date, il n’a reçu pas même un sou pour les ventes effectuées depuis le mois d’octobre 2019. « Les activités scolaires et académiques sont déjà reprises depuis plusieurs mois. J’ai trois enfants qui sont encore à l’université. Tous dans des universités privées. À date, je continue à me demander comment qu’est ce que je vais faire pour répondre à leurs obligations, alors que je ne comptais que sur les retours liés à la vente de Café?», se questionne le producteur.

Annitia est aussi productrice de café à Dondon. Elle cultive avec son mari, plus d’un hectare de terre. Cette jeune femme qui frôle à peine la quarantaine travaille aussi dans une coopérative d’achat et d’exportation de cafés. Son travail consiste, aux côtés d’autres jeunes femmes comme elle, à laver, trier et ensacher les meilleurs grains de café, après les avoir séchés au soleil.
Annitia est tout aussi dérangée par l’impact de la Covid-19 sur cette activité qui est dysfonctionnelle depuis le 19 mars dernier, date de la découverte des premiers cas de la maladie dans le pays. « L’année dernière, mon mari et moi avions investi tout notre argent dans la création d’une pépinière de caféiers, pour remplacer les anciennes plantes. Nous avions ainsi misé sur l’argent que nous allons gagner dans les cafés que nous avions vendus au cours de la même année. C’était malheureusement un très mauvais calcul. », regrette cette mère de famille, qui n’arrive pas à joindre les deux bouts et trouver de quoi répondre aux exigences de son foyer.

C’est vrai qu’à Dondon, une commune d’environ 26 000 habitants, située à 32 kilomètres, à l’entrée Sud-Est de la ville du Cap-Haïtien, sur la route nationale numéro 3, le coronavirus n’a pas eu d’impact majeur sur la santé de la population. Mais, sur le plan économique, la situation reste alarmante. Beaucoup d’agriculteurs ont dû abandonner leurs champs par crainte de se faire contaminer. Les coopératives d’achat et de commercialisation du café ont toutes été fermées. C’est ce qui a en quelque sorte ralenti la circulation des devises dans la commune et contribuer du même coup à rendre plus vulnérables les ménages les plus faibles.

Agronome Bien-Aimé est un natif du Dondon. Il travaille depuis une quinzaine d’années à la formation des techniciens agricoles, à l’école moyenne d’agriculture, située dans la commune. Agronome Bien-Aimé vit aussi de l’agriculture. Il est d’ailleurs classé parmi les plus grands producteurs de café de la commune. En dépit des moyens dont il dispose pour répondre à ses besoins primaires, le spécialiste en agriculture souligne avoir connu un début d’année difficile sur le plan économique, occasionné par l’épidémie de coronavirus qui continue de faire des victimes dans le pays. « Écoute, c’est triste. Le coronavirus nous a mis à genou. Nous sommes KAO. C’est le Bondieu qui nous garde encore en vie », explique l’entrepreneur agricole, l’air attristé.

Bien-Aimé déplore la façon dont le ministère de l’agriculture a traité les agriculteurs du pays, durant la période de Covid-19. « A Dondon, le MARNDR nous a complètement négligés dans ces moments difficiles où sa présence devait être inévitable.», constate le jeune technicien.

Pour diminuer le choc économique ainsi que l’impact que le coronavirus peut entraîner sur les agriculteurs, en particulier, ceux de la commune du Dondon, Agr Bien-Aimé insiste sur un plan de relance de la production agricole un peu partout à travers le pays, notamment à Dondon. Cette commune du département du Nord est potentiellement agricole. Le café, la banane et l’igname sont les principales denrées agricoles de Dondon dont ses 26 000 habitants ont du mal à se relever des impacts du nouveau coronavirus.

Auteur : Louiny FONTAL, Courriel : fontallouiny1980@gmail.com