«Des rues bloquées, des entreprises privées et publiques vandalisées, des élèves restaient prisonniers dans leurs domiciles, plusieurs protestataires tués et deux journalistes assassinés puis une inflation atteint un seuil de 20%» sont les points qui ont plus marqué les  six derniers mois de protestations pour exiger le départ du président Jovenel Moise. Les protagonistes veulent faciliter la reprise de la vie normale dans le pays. Ils ont annoncé  à l’unisson la reprise des activités scolaires, le lundi 06 janvier 2020.

Port au Prince, https://www.lemiroirinfo.ca, Dimanche 05 janvier 2020

En effet, sur son compte Twitter, le sénateur Youri Latortue a écrit «Gonaiviennes, Gonaiviens, Je suis fier de votre courage. Le 6 janvier nos enfants iront à l’école, cependant la mobilisation continue chaque week-end.  Bonne année de combat. Votre détermination est un exemple». L’homme qui a contribué à propulser le natif de Trou du Nord- département du Nord’Est, au pouvoir est passé dans le camp des opposants après avoir déduit que les promesses et les actes du président Jovenel Moise ne s’accordent plus avec ses actions gouvernementales.

De son côté, Me André Michel, porte-parole du secteur démocratique et populaire abonde dans le même sens:«Nou p’ap kite Jovenel Moïse fè pitit pèp la pédi ane lekòl la. Mobilizasyon pou fòse Jovenel kite pouvwa a pral fèt Vendredi, Samedi, Dimanche. Mobilizasyon an pral fèt nan nwit, 6zè diswa, 8tè diswa, 10zè diswa, minuit elatriye, men fòk pitit pèp la tounen lekòl». «Nous ne laissons pas à Jovenel Moise de faire pedre une année scolaire aux enfants du peuple. La mobilisation pour forcer Jovenel d’abandonner le pouvoir  fera en fin de semaines, entre 6h du soir et minuit. Mais il faut que les enfants du peuple retournent à l’école». André Michel.

Toutes les couches sociales ont été touchées par les derniers mouvements sporadiques baptisés «Peyi Lok». Le leader du parti, Mouvement de Troisième Voie Ayiti, l’homme d’affaire, Reginald Boulos croit que le mouvement doit continuer sans empêcher le retour des enfants à l’école et le fonctionnement de certains services publics et privés. «Je ne peux commenter sur l’activité elle-même. Mais il est essentiel que la mobilisation continue sans que ceci n’empêche aux enfants d’aller à l’école, aux hôpitaux de fonctionner, aux plus pauvres de gagner le pain quotidien et sans détruire encore plus l’économie. Jovenel fait déjà un « bon » travail à enfoncer le pays dans la crise humanitaire et sociale. L’opposition ne doit pas l’aider à le faire»-Reginald Boulos.

La redéfinition des stratégies de mobilisation contre Jovenel Moise a été vue sous plusieurs angles. Cette décision a permis à certains citoyens tant de la diaspora et d’Haïti de se trouver dans la lutte de l’opposition et qualifient de sagesse, cette mesure de permettre aux jeunes de reprendre le chemin de l’école. Pour d’autres, c’est un signe de faiblesse qui démontre que l’opposition est affaiblie et justifie la cassure de ces mouvements de protestation.

«De mon point de vue, c’est une très bonne chose de donner l’accessibilité à la poursuite de la scolarité des élèves. Cependant, il me paraît que le droit constitutionnel de manifester risque de se heurter à la protection de l’ordre public eu égard à l’heure fixée pour se réunir, soit 20h. Dans ce contexte, il serait légitime que l’État prenne le prétexte de la garantie de la sécurité publique pour interdire ces manifestations de nuit. En tout état de cause, cette décision de l’opposition démontre la montée en puissance de la confiance du Président de la République dans cette bataille, la reconnaissance de l’affaiblissement de l’opposition dans ses stratégies politiques et la perte de momentum politique dans cette lutte de gouvernance publique».- Me BLAISE Guerby-Enseignant du droit pénal et de procédure pénale d’universités.

«Je pense que c’est une décision de sagesse. Car, les élèves ont besoin de poursuivre leur formation académique. Pour rigoler je dirais que le mouvement de l’opposition va devenir une mobilisation chanpwèl bizango»- Maquilene Baptiste.

Photo: Me Hérode Charnel

Le juriste, Resias Pierre-Eddy doute aussi que les membres de l’opposition pourraient heurter à des prescrits légaux pour organiser leur manifestation nocturne. Manifester la nuit ? «Je doute fort qu’il n’y ait pas un vide constitutionnel sur ce point. Trêve de parole! D’après mon approche socio-politico-juridique c’est de la pire démagogie pourvue que cette décision immature de nos politiciens écervelés aura une lourde  conséquence sur le pays quel que soit sa durée»!

Ce jeune enseignant et juriste, Patrick Orelus, consacre son temps dans la formation des écoliers haïtiens. Il s’exprime ainsi de cette nouvelle de la reprise des cours. « J’applaudis chaudement cette décision de l’opposition : çà permettra à des milliers d’enfants de reprendre le chemin de l’école. Bravo aux opposants ! Deside pousuiv manifestasyon yo lannwit e nan fen semen, se byen, ça fera du bien non seulement aux nombreux parents et élèves qui ont souffert terriblement pendant la période de (peyi lòk), mais aussi aux forces opposantes. C’est pour  elles un moyen de se laver l’image, se faire pardonner le péché, le crime d’avoir privé des milliers de fils et filles, considérés comme l’avenir du pays, de leur joie, leur bonheur de se former, en les empêchant de se rendre à l’école. Je crois que c’est un moyen pour les  membres de l’opposition de témoigner leur solidarité au peuple haïtien. Cette méthode de combat est pourtant si décriée. J’ignore ce qui va se passer, mais j’ai le pressentiment qu’il va y avoir des pertes considérables en vies humaines si cette dynamique des manifestations nocturnes se tient»-Patrick Orelus.

Pour ce citoyen, décider d’organiser des manifestations de nuit « C’est aveu d’impuissance d’une opposition minée, ruinée, à genou et en panne d’inspiration. Il demeure certain qu’avec son costume de « Joujou présidentiel, il ne pourra jamais gérer ce beau pays. Car, sa virginité politique et administrative est déjà perdue. Si yo pa rilaks, lari a t’ap manje kadav yo tout. Sa ki vle y’ap konprann men pep la p’ap pedi batay epi imoralite p’ap janm tounen selebrite sou bout tè sa ki se senbol libète ak diyite»-Wilnique Dorsainvil.

Reconnu pour son dynamisme dans la formation des jeunes, Eddyson Zéphyr, pense que les leaders de l’opposition sont aussi démagogues que le président Jovenel Moise qu’ils réclament son départ. « Les leaders de l’opposition ne sont pas differents de nos dirigeants. Trois mois de fermeture des écoles sous pretexte que le système éducatif doit changer. Maintenant, ils sont favorables à la reouverture des classes? Quel revirement spectaculaire de l’homme de lois? Me André Michel doit lancer les inscriptions pour son réseau de gang qui va opérer toutes les fins de semaines à partir de 08heures du soir»- Eddyson Zéphyr.

Cependant, l’État prendrait-t-il toutes les mesures nécessaires pour permettre aux jeunes haïtiens de poursuivre leur année scolaire ? Les manifestations nocturnes auraient-t-elles des contraintes légales pour se tenir  et quelles formes prendraient-t-elles ?

Enfin, «L’enfant d’aujourd’hui est l’homme de demain». Ceci dit, si nous voulons un pays, nous devons préparer l’avenir et, la meilleure façon de le faire c’est par l’éducation. Certains observateurs estiment qu’en prenant cette décision d’inviter les enfants à aller à l’école,  l’opposition opte pour l’avenir et une relève assurée. Quand on sait,  tout ce qu’il y a comme problème en Haïti pour les écoliers, on se demande pourquoi cherchent-ils á l’augmenter?

On espère que l’opposition envisagera d’autres stratégies pour bien contribuer aux règles démocratiques tout respectant, l’exercice de ce précieux Droit de la 2e génération des Droits de l’homme qu’est celui de l’éducation. Qu’ils soient des hommes et des femmes politiques  responsables, vis-à-vis de nos enfants et notre pays.

Auteur : Quetony SAINT-VIL