Marie Danise Pierre dit Gros Bébé, propriétaire du restaurant gros bébé nous laisse et son histoire est teintée d’un leadership éclairé. Elle a été une modèle en matière d’entrepreneuriat et de résilience dans la ville du Cap-Haïtien où le plan musical et culturel son cœur avait trouvé le plaisir dans les deux formations musicales de la ville « Septentrional et Tropicana d’Haïti ».

Photo: Marie Yolette B Daniel

Cap-Haïtien, https://www.lemiroirinfo.ca, Samedi 24 Août 2024

Décédée, ce vendredi 23 aout 2024, Marie Danise Pierre dit Gros Bébé, propriétaire de Gros bébé bar restaurant, nous raconta son histoire de vie, en avril 2016, lors d’un reportage multimédia réalisé pour le compte de la mission des nations unies pour la stabilisation en Haïti.

Voici l’intégralité de l’article publié le 19 avril 2016 avec le support de ma collègue d’alors, Marie Yolette B Daniel.

« J’ai commencé  mon business sur le trottoir de la rue 12 de Cap-Haitien,  grâce à un don de 20 dollars américains », explique Marie Danise Pierre, plus connue sous le pseudonyme ‘’Gros Bébé’’.

Ce fonds de démarrage, elle l’a reçu d’une amie qui vivait à Turcs and Caicos  vers les années 1986-1987 alors que ses activités lucratives consistaient jusque-là à offrir de l’ « akasan », au même endroit. Entendez par ‘’Akasan’’, une purée de maïs qu’on fait cuire au feu à laquelle sont ajoutés des éléments tels le lait et/ou le sucre au moment de la consommation, particulièrement aux heures de la matinée.

Avec les 20 américains qui à l’époque valaient 100 gourdes, cette femme célibataire d’environ 30 ans, obsédée par le commerce, a décidé de changer son business. Bloquée jusqu’à date par un manque de moyens financiers, originaire de la commune de Trou du Nord, passe de l’akasan aux fritures, communément appelées en Haïti « fritay ».

 « Avec les 20 dollars, J’ai acheté une caisse d’ailes de dindes pour l’équivalent de 16 dollars et avec le montant restant, je me suis procurée d’autres produits tels la banane et l’huile» a-t-elle expliqué, soulignant qu’ « une autre amie m’a prêté deux chaudières et deux réchauds ( à charbon de bois)».

Malheur des uns, bonheur des autres

Après quatre années passées au même emplacement à réaliser la même activité, elle a pu, grâce aux bénéfices récoltés, louer une petite maison, certes  en bois mais recouverte de tôle, juste à proximité. Une bâtisse dont elle en deviendra la propriétaire quelques années plus tard, soit en 1992.

Grâce à des prêts bancaires qu’elle continue d’honorer, Marie Pierre a pu donc non seulement réparer, mais a réussi à transformer la maison en un  restaurant dont la renommée n’est plus à faire dans la 2e ville du pays.

Et, avec l’arrivée d’une mission de l’Organisation des Etats Américains (OEA) en 1991 soit quelques mois après le coup d’État contre le gouvernement Lavalas en septembre de cette même année, le ‘’Gros Bébé’’ bar restaurant allait connaitre le boom de son existence.

Proximité oblige, presque tous les employés de ce bureau logé à la rue 11, soit à moins de deux minutes de marche de l’entreprise à la rue 12 y venaient prendre leur lunch et certaines fois leur petit déjeuner. « Le gros bébé est le seul restaurant qui était plus prêt de ce bureau et m’a facilité d’avoir une bonne clientèle  »,  a-t-elle justifié.

Et, cet élan ne s’était pas stoppé même après le départ de la mission de l’OEA  qui allait être remplacée par une mission de l’ONU, à savoir la Mission des Nations Unies en Haïti (MINUHA), certes beaucoup plus importante, mais qui a choisi le même bâtiment de la rue 11 pour placer ses bureaux. Une décision qui a favorisé la stabilité de la clientèle de Marie Pierre, si non de l’augmenter.

Motivée par deux boussoles

« Quand on fait un business, on n’a pas le droit de se décourager. Il faut avancer même si on sait qu’on risque la faillite », estime Marie Pierre selon laquelle sa réussite dépend de deux `facteurs principaux. « L’amour de ce que je fais comme  métier et la discipline » » confie d’un air souriant cette femme dont le niveau d’études ne dépasse pas les classes préparatoires.

A ces deux critères, elle veut ajouter la sécurité et la tranquillité. Parce que « les moments de turbulence politique et sociale sont très déficitaires, car les clients, craignant pour leurs vies et parfois leurs véhicules,  préfèrent se terrer chez eux.  Alors que quand il y a la  paix et la stabilité, ils sortent et toutes les activités économiques sont plus rentables » argumente celle qui avoue que par faut de compétence, elle confie la comptabilité de son entreprise à un cabinet comptable.

Si ‘’Gros Bébé’’ répond à la plupart des gouts et commandes de ses clients, « notre spécialité reste le ragout de bœufs généralement servi avec du maïs moulu », raconte souriante, cette négresse, mieux connue sous le nom de ‘’Danise Gros BB’’.

Manifestement drôle et sympathique, cette mère célibataire ne laisse jamais passer l’occasion de partager des anecdotes et ses expériences personnelles avec ses employés, en majorité des jeunes femmes issues de sa commune natale, Trou du Nord, dans le département du Nord ’Est, à environ 30 minutes de route du Cap-Haitien.

Des expériences dont Marie Danise Pierre est plutôt fière et qui  lui ont valu le prix Joseph PREVOST en 2012, le prix de Jeunes Chambre Internationale et le prix digicel 2014 de l’entrepreneur de l’année pour son leadership et son sens des affaires.

Rédaction : Quetony SAINT-VIL